Aujourd’hui je vous donne rendez-vous au comptoir du commissaire de bord. Préparez votre monnaie et votre maillot de bain car nous allons descendre jusqu’au pont F. Il est grand temps de nous détendre un peu en profitant de la piscine du RMS Olympic.

Nous l’avions déjà entre-aperçue lors de notre visite des quartiers de première classe le 10 juin 1911. Mais cette fois, nous allons pouvoir pleinement en profiter !

Rendez-vous dans le grand escalier

Ah, vous voilà ! Alors que vous arrivez par le grand escalier avant sur le pont C, je vous fais signe de la main pour que vous approchiez. Nous allons nous rendre sur tribord pour acheter nos tickets au bureau du Commissaire de Bord.

Par chance il n’y a pas foule aujourd’hui et nous sommes vite pris en charge. On nous rappelle aimablement les horaires de la piscine : pour les gentlemen de 6h00 à 9h00 puis de 14h00 à 19h00. Les dames, elles, sont admises de 10h00 à 11h00. Bien entendu les maillots de bain sont obligatoires !

Nous acquiesçons poliment et demandons le tarif des tickets. Nous apprenons alors que les hommes peuvent accéder à la piscine gratuitement le matin. Des tickets peuvent êtres achetés au tarif de 1 shilling (5$ en 2020) pour ceux qui souhaitent profiter de la piscine et des bains turcs. Ceux qui ne souhaitent accéder qu’à la piscine en journée devront débourser la somme de 25 cents par personne.

Pendant que nous reprenons le chemin du grand escalier tickets en poche et maillots de bain dans nos sacs, nous ne pouvons nous empêcher de sourire en entendant un passager faire l’intéressant auprès d’une ravissante jeune femme.

« Vous savez, avoir mis une piscine sur un paquebot c’est un exploit ! C’est absolument inédit ! »

Si nous sourions, c’est que nous savons tous les deux que cette rumeur tenace est tout à fait fausse. Le RMS Olympic n’est pas le premier paquebot à disposer d’une piscine. La White Star Line avait déjà tentée l’expérience à bord de l’Adriatic en 1907.

Et même si les dimensions de la piscine de l’Adriatic font plus penser à une grande baignoire, elle eu le mérite de valider l’intérêt des piscines à bord des paquebots.

Entrons dans la piscine du RMS Olympic

Nous descendons les dernières marches du grand escalier et empruntons l’escalier plus petit qui mène au pont F. Là nous passons une épaisse porte de cloison étanche et suivons un étroit corridor qui nous mène sur tribord. Deuxième porte à gauche, nous y voilà !

la piscine du rms olympic
La piscine du RMS Olympic est sobrement décorée (1)

Les murs de la pièce sont d’un blanc éclatant et le sol est couvert de carreaux blancs et bleus. La pièce est éclairée par la lumière naturelle de 8 hublots ainsi que de nombreuses ampoules au plafond. Derrière nous, nous trouvons une table chargée de serviettes blanches propres et une coiffeuse qui a été ajoutée après guerre.

Ce matin nous sommes seuls, à croire que les passagers sont encore tous endormis. Ça nous laisse l’embarras du choix pour nous changer parmi l’une des 13 cabines à porte d’acajou.

Premier plongeon !

L’eau est limpide, la piscine vient tout juste d’être remplie alors que nous naviguions entre Cherbourg et Queenstown. Elle sera vidée avant que nous arrivions au Chelsea Piers de New York puis remplie à nouveau lorsque le paquebot sera en mer.

Les deux plongeoirs me donnent des idées de figures à réaliser mais vous me rappelez avec raison que l’eau n’est profonde que de 1,40m à 1,65m et que quelques accidents se sont déjà produits ici. Ça me rappelle qu’un steward m’a dit que les plongeoirs étaient retirés par gros temps pour éviter que les plus téméraires ne viennent heurter le fond de la piscine en plongeant au mauvais moment. Ne prenons pas de risque, nous nous contenterons de quelques longueurs de bassin !

D’ailleurs des longueurs, il va falloir en faire quelques dizaines pour nous maintenir en forme. Avec ses 10m de long pour 4,26m de large, la piscine du RMS Olympic est certes la plus grande sur un paquebot mais elle reste de taille modeste.

En descendant prudemment les marche des deux petits escaliers qui nous permettent d’entrer dans l’eau, je remercie Thomas Andrews d’avoir fait couvrir le marbre très glissant une fois mouillé par du teck. L’architecte naval avait noté dès le voyage inaugural du paquebot que ces marches avaient causé des incidents.

Nous descendons les 6 marches qui nous séparent de l’eau. Les bords du bassin surplombent l’eau salée de 90cm pour éviter que la piscine ne déborde en cas de mouvements importants du navire. Au total donc, le bassin à une profondeur qui va de 2,30m à 2,55m.

Un air océanique

Ah ! Je croyais que la piscine était chauffée mais l’eau est clairement rafraichissante voir vivifiante ! Il s’agit tout simplement d’eau de mer pompée à bord. Ce qui est intéressant avec l’eau de mer, c’est que nous n’en manquerons pas au milieu de l’océan. Elle est donc renouvelée en permanence et la piscine est vidée et entretenue régulièrement au cours du voyage.

Regardez, l’eau arrive par une bouche au niveau de la dernière marche de l’escalier avant, là ou l’eau est la moins profonde. Une autre bouche permet l’évacuation de l’eau à l’autre bout de la piscine.

Une fois accoutumé à la fraicheur de l’eau, la baignade est agréable. J’imagine qu’elle doit être d’autant plus appréciée par ceux qui ont commencé par faire un tour du côté des bains turcs. D’ailleurs, que diriez-vous d’y aller ensemble prochainement ?

L’heure tourne, j’aperçois sur l’horloge qu’il sera bientôt 9h00. Il est grand temps de s’extirper de l’eau pour nous rincer. Nous remontons le petit escalier.

Vous reconnaissez les carreaux blancs et bleus qui tapissent le sol de la pièce. Ils viennent de chez Villeroy & Boch, une véritable institution depuis 1748 dans le monde des salles d’eau. Ce sont des carreaux que vous avez déjà aperçu à plusieurs reprises dans des salles de bains d’autre paquebots et ce modèle précis, le 562, était produit de 1886 à 1920.

Surpris par votre spectaculaire connaissance de ces carreaux que j’avais à peine aperçu, je décide de me pencher pour les observer de plus près.

piscine rms olympic
Les carreaux octogonaux mesurent 18cm de diamètre pour 1,5cm d’épaisseur (2)

Nous entrons maintenant chacun dans l’une des deux petites cabines de douche à l’eau claire et fraiche puis allons nous habiller dans nos cabines respectives.

Les autres piscines de la Classe Olympic

En remontant le grand escalier pour nous rendre sur le pont promenade, nous poursuivons notre conversations sur les piscines des autres paquebots de la Classe Olympic. Concernant celle du Titanic, elle était une copie presque parfaite de celle de l’Olympic.

Listons ensemble les quelques différences notables :

  • Pas de plongeoir
  • Pas d’horloge (elle n’avait semble-t-il pas encore été posée)
  • La règle de mesure de fond était positionnée différemment
  • Deux caillebotis de teck au niveau des deux entrées dans la piscine pour éviter les glissades
  • Les espaces ouverts et vides sous les escaliers de la piscine de l’Olympic ont été fermés et carrelés sur le Titanic

Celle du Britannic n’aura pas eu un destin plus brillant que celle du Titanic. Mais sur le papier, elle aurait largement surpassé le luxe et la beauté des piscines de ses jumeaux.

Nous voilà maintenant sur le pont promenade. Je vous laisse le temps d’aller profiter de l’air marin et je vous donne rendez-vous dans un prochain article pour découvrir un autre pan de l’histoire du RMS Olympic.

Samuel Longin

Sources : Encyclopedia Titanica : the swimming bath / Luxury Liner Row : first class swimming pool’s tile / Titanic, the ship magnificent, Vol. 2, P.412 à 418, Bruce Beveridge –

Photos : (1) La piscine du RMS Olympic, An unsinkable Titanic, Bernard Walker, https://en.wikipedia.org/wiki/File:Swimming_pool_of_the_Titanic.jpg / (2) Carreau provenant de la piscine du RMS Olympic, Collection de Samuel Longin